À 41 ans, Veljko Indjic, capitaine emblématique de la Nationale 2 du SMV Handball, s’apprête à disputer son dernier match à domicile. Un moment fort dans l’histoire du club, et l’occasion de revenir sur le parcours d’un joueur hors norme, de la Serbie à Vernon, en passant par la Ligue des Champions et l’équipe nationale. Il raconte.
« Je n’étais pas un grand talent, mais un bosseur »
Veljko découvre le handball tard, à 13 ans. « J’avais essayé tous les sports avant ça. J’étais pas spécialement doué, pas très grand, pas très costaud… mais j’ai toujours été un bosseur. Si tout le monde faisait 10 pompes, j’en faisais 15. C’est ça qui a fait la différence. »
Rapidement, il grimpe les échelons dans son club formateur, le Dynamo Pančevo, en Serbie. À 16 ans, il intègre l’équipe première, et à seulement 17 ans, il en devient capitaine. En parallèle, il est sélectionné avec la Serbie -19 ans et se qualifie pour les championnats d’Europe.
L’Étoile Rouge de Belgrade, l’un des clubs les plus prestigieux du pays, le repère. « Je signe là-bas, mais il y a eu un problème de paiement de transfert entre les clubs. Je retourne à Pančevo, sans bon souvenir de cette histoire. Ça m’a un peu cassé. »
« J’avais perdu l’ambition... jusqu’à un appel de mon meilleur ami »
Veljko se concentre sur ses études et met le hand en second plan. « J’étais étudiant, je commençais à travailler. Le hand n’était plus une priorité. »
Mais son destin bascule grâce à son ami Nemanja Marjanovic, alors joueur à Karviná en République tchèque. « Il m’invite chez lui. Ce n’était même pas prévu pour un essai. Mais il m’a dit : "Tu devrais tenter." »
Après un ou deux entraînements, le club lui propose un contrat. « C’était fou. Je jouais en deuxième division serbe, et d’un coup je signe dans un club qui joue la Ligue des Champions. »
Trois saisons en République tchèque, des souvenirs gravés
« J’étais jeune, j’avais de l’énergie à revendre. Je jouais 60 minutes à chaque match, que ce soit en championnat, en coupe ou en Ligue des Champions. »
• Saison 1 :
Karviná est déjà éliminé d’Europe quand Veljko arrive. Il s’adapte, travaille, et remporte le championnat et la coupe nationale.
• Saison 2 :
Il découvre enfin la Ligue des Champions, en affrontant Kiel, GOG Gudme, et Constanta.
« Contre Kiel, on joue une grande équipe. Karabatic, Omeyer, Lovgren, Christiansen… c’était la grosse équipe, celle qui gagne la Ligue des Champions cette année-là. Contre Gudme, on joue contre un jeune Mikkel Hansen, il devait avoir 18 ans, mais il met 20 buts sur les deux matchs. C’était clair qu’il allait devenir immense. »
• Saison 3 :
Karviná tombe dans un groupe avec Barcelone, Ivry et Tchekhov.
« On finit 3e du groupe, mais contre Ivry, j’ai fait un bon match. C’est comme ça qu’ils m’ont repéré et qu’ils m’ont appelé. »
Ivry, six saisons au plus haut niveau
En 2008, Veljko rejoint Ivry en première division française. Il y restera six saisons, devenant un joueur reconnu et respecté.
« J’ai été nommé plusieurs fois dans les 5 meilleurs pivots du championnat. Je ne marquais pas énormément, mais je provoquais beaucoup de pénaltys. »
Sous les ordres de plusieurs coachs, il ne défend pas les premières années.
« C’était une décision du coach. Je ne sais pas si c’était bon pour moi ou pas. »
Parmi ses coéquipiers marquants :
« Fabrice Guilbert, un exemple. F-X Chapon, Davor Dominikovic… Des joueurs que je n’oublierai jamais. »
Il dispute la finale de Coupe de France contre Montpellier, et deux campagnes européennes :
« On va en 1/4 de finale de la Coupe EHF contre Gummersbach, puis l'année d'après on joue Metalurg Skopje qui ira en finale. C’était une belle aventure. La finale contre Montpellier, on joue très bien mais on perds de 5 buts. C'était une grosse équipe avec les retours de Karabatic et Kavticnik »
La sélection serbe, une fierté discrète
En 2009, après sa première saison à Ivry, il obtient ses premières sélections avec la Serbie.
« J’ai joué les Jeux Méditerranéens, on bat la France en finale avec des mecs comme Accambray, Dumoulin, Saurina… Je crois que j’ai environ 30 sélections. Je n'ai jamais fais de grande compétition comme les championnats d'Europe ou du Monde, mais des qualifs et des amicaux. »
Vernon, le coup de cœur inattendu
Après sa dernière saison à Ivry, il ne trouve pas de club en D1 ou D2. Vernon vient de descendre en Nationale 1.
« Je cherchais un club proche de Paris pour faire un an avant de retourner en Serbie. Mais j’ai rencontré Jérôme Delaporte puis Benjamin Pavoni est revenu, et j’ai eu envie de rester. Benjamin m'a transformé. C'est lui qui m'a fait défendre. J'ai connu beaucoup d'entraineur que ce soit en sélection ou en club, mais c'est un des entraineurs que je retiens le plus. »
À Vernon, il s’épanouit :
« À l’époque, on a raté la montée deux fois, mais on a toujours tout donné. On a finalement réussi à monter en D2. On a connu pas mal de choses, et je voulais finir sur une montée — cette saison, on l’a fait. J’espère que ça aidera le club à retrouver, au minimum, la D2. Vernon m’a aussi permis de rencontrer de très bons joueurs, comme Pablo Marrochi ou Féfé : ce sont des joueurs qui m’ont marqué.
Je devais rester un an… Ça fait dix ans maintenant. »
Le brassard et le respect du vestiaire
Capitaine depuis deux saisons, Veljko a trouvé sa place naturellement.
« L’ambiance est top. Les jeunes respectent les anciens. On rigole beaucoup mais je dis toujours avant le match : les gars, j’espère qu’on gardera le même sourire après. Tout le monde comprend. »
Il rend hommage à son coach actuel :
« Patrick (Bonte), c’est un super coach. En une saison, il a su faire éclore des gars comme Feli, Jacques, Nathan. Il a un vrai potentiel. »
Une dernière danse, et un nouveau rôle ?
« Samedi, ce sera mon dernier match à domicile. Je vais raccrocher, mais je resterai supporter. Je me mets juste un peu plus loin derrière le banc. »
Installé à Vernon, son fils y joue déjà.
« J’espère qu’il sera meilleur que son papa. Peut-être que je deviendrai coach. En tout cas, Vernon a gagné un nouveau supporter. Merci pour ces dix années. »